Frigyes Karinthy - Poésies : À nul je ne peux le confier

                                                           

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le cirque s’Écroule

 

Le cirque s’écroule. Eh bien maintenant

Que deviendras-tu ? Tu hésites encore ?

Et tu fixes stupidement les clous

À travers ta cheville et tes poignets ?

 

Le cirque s’écroule. Craquent sourdement

Et se tordent les voûtes charpentées –

La canaille troupeau braille à tue-tête,

Le collègue Néron s’inquiète aussi,

 

 

Jusqu’ici ce n’était pas vraiment une vie –

Mais comme mort, ce n’est pas vraiment une mort !

Ni un enterrement ? Ni même un carnaval ?

Ni plaisir terrestre ? Ni harpe céleste ?

 

Toi qui dans mon cœur dormait sourdement

Dont ce que je sais est que tu vivais

Il y a longtemps sur cette planète

Tu n’as fait le mal à personne

 

Mystérieux ancêtre, qui que tu ais été,

Un archange, ou bien un orang-outang,

Deviens mon serviteur et chien fidèle,

Réveille-toi, saute, griffe, mords !

 

Mords-le à sa gorge, c’est ce qu’il faut faire !

Nulle manne dans le bec de la colombe –

Les étoiles, toutes, se trouvent trop loin,

Proche est la misère, la souffrance.

 

Ramasse ses nippes, pour partir se traîne,

Cligne des paupières un peu pâlement –

Mon collègue, allons, le cirque s’écroule !

Les statuettes vacillent aussi.

 

Martyr, public, cela est égal maintenant !

Que ce soit grâce écrite, ou clémence céleste -

Que ce soit Dieu ou homme – ça revient au même !

C’est pareil lorsque le cirque s’écroule.

 

Plus personne ici ne désirera savoir

L’inscription écrite sur la croix là-haut –

- Eh bien, qu’en dis-tu, toi, fameuse Intuition,

Qui ne fait que bâiller à mon destin ?

 

 

Aide-moi à descendre de cette potence

Essuie sur mon front ces larmes étiques

Qui ont envahi mes deux yeux qui voient

Et ce plat sourire de martyr –

 

Ensuite le cirque pourra s’écrouler,

Ni malédiction ni prière ne dis –

- Que chacun s’échappe, et sauve qui peut !

En ce monde-ci vaque à tes affaires.

 

 

 

Suite du recueil