Affecter un thème aux nouvelles de Karinthy est une gageure, tant ses approches sont multiples. Mais cela m’a semblé nécessaire pour que le lecteur s’y retrouve dans une récapitulation générale. Les romans parlent d’eux-mêmes, mais les innombrables nouvelles ou chroniques ont été écrites au jour le jour, au fil des années. Elles constituent aujourd’hui un ensemble représentatif de la vision et du style de l’auteur. Les répartir en thèmes permet de mieux aborder une facette particulière de cette pensée universelle.

Ce classement est néanmoins largement arbitraire, tant de nombreux textes pourraient être affectés dans plusieurs thèmes. J’explique sommairement les guides de ces choix en tête de chaque thème. La ligne essentielle étant la recherche de ce que désirait premièrement l’auteur au moment où il a écrit sa nouvelle : faire rire (thème "humour") – traiter un sujet d’actualité (thème "société" ; le thème "drame" isole des problèmes de société à travers des situations à l’issue fatale) – se projeter dans un avenir lointain (thème "science-fiction", mais dans ce cas le sujet n’est jamais gratuit, il conduit souvent à une réflexion sur la nature humaine) – le fantastique et l’absurde ont une place privilégiée dans son œuvre, tant il y est passé maître et précurseur de nombreux autres dans ces domaines : j’ai privilégié cet aspect quand il pouvait s’imposer. Les autres thèmes se décrivent mieux : souvenirs et approches personnels, description de caractères (parfois proches de La Bruyère), guerre (le traumatisme de la guerre de 14 a été immense pour sa génération bien sûr, et pour lui plus que tout autre), politique, Budapest et la Hongrie (pris en particulier).

Le thème "satire" se situe à la frontière des thèmes "humour" sans en avoir la gratuité et "société" sans en aborder un aspect général ; ces chroniques et nouvelles tendent à mettre en relief l’absurdité ou le paradoxe d’une situation réelle ou du comportement d’individus.

Les thèmes "religion" et "philosophie" sont connexes, mais Karinthy était un déiste à tendance agnostique, aussi j’ai préféré mettre à part ses textes qui abordent spécifiquement la foi et la religion.

Karinthy a bien sûr abordé de nombreuses fois les sujets concernant les tendances artistiques de cette première moitié du XXe siècle : le thème "littérature" parle de lui-même, mais les thèmes "théâtre, spectacles" et "cinéma" traitent spécifiquement de ces sujets, souvent sur un mode très satirique, mais aussi de nombreuses fois de la place du cinéma, d’abord muet, puis parlant à partir de 1929 (en Europe).

Les thèmes "folie" et "psychanalyse et psychologie" sont également connexes, mais Karinthy aborde souvent la folie de façon directe et descriptive, la psychologie et la psychanalyse sont traités à la lumière des travaux de Freud, Ferenczi et leurs contemporains.

Les thèmes "amour" et "rapports entre les hommes et les femmes" ont été tout particulièrement privilégiés chez Karinthy que ce soit sous l’angle humoristique, sérieux ou philosophique. On a dit que Karinthy était misogyne. C’est inexact. Il adorait les femmes (qui le lui rendaient bien), mais il critiquait avec toute l’ironie qui est la sienne les tournures que se donnaient « les femmes à la mode », « les femmes du monde ».

Hitler et le Nazisme apparaît dans la presse à partir de 1933 et sera abordé malgré la censure jusqu’à la mort de Karinthy en 1938. Le ton est généralement satirique ; la révolte et le dégoût pointent derrière la satire. Des métaphores sont parfois employées pour contourner la censure.

Le thème portraits réunit les portraits (souvent des nécrologies) que Karinthy a écrits, principalement dans la presse.