Frigyes Karinthy : "Souvenirs de Budapest"
sucres
Où je
raconte en toute franchise les sucres auxquels j'ai goûté, enfant
dans le quartier de Józsefváros.
1. sucre de pomme de terre
Petit
morceau
2. guimauve
Matière blanche
caoutchouteuse dans laquelle sont incrustés de petits objets incertains.
Le marchand de foire la tronçonne à l'aide d'une pelle. La
même chose emballée dans du papier d'argent, décoré
d'une petite image.
3. sucre de pavot
Petit objet cylindrique contenant
des fossiles de pavot. Dur comme du bois. Impossible de mordre dedans, par
conséquent on le prend dans la bouche ; bien gardé au chaud
dans la bouche, quelques jours plus tard il dégèle et glisse d'un
trait. Ça ne nous empêche pas de manger et boire, nos aliments ne
gâchent pas son arôme.
4. sucre torsadÉ
Petit bâton long d'environ
douze centimètres muni d'un pas de vis. Il est de couleur rouge et
blanc. Son goût rappelle celui des gravats braisés.
5. petit Nounours rouge
Petite forme rouge avec deux bras
et deux jambes, on peut l'étirer, c'est comme du caoutchouc. Ça
devient un plaisir de le manger une fois que dans la main il est devenu
bordeaux grisâtre et sa tête est collée dans les moutons de
poussière accumulés au fond de la poche du manteau et qu'il y a
dans son ventre une punaise et un morceau de crayon à encre, et il est
garni de petites miettes de pain comme la viande panée. Ça vaut
un sou.
6. poussah
Sur une sorte de baguette de bois
une petite poupée de sucre est suspendue à un élastique.
On la tend avec l'élastique et quand on la lâche elle saute.