Frigyes
Karinthy : Nouvelles parues dans la presse
notre hebdomadaire offre
Hé ! David ! Appelez Monsieur Palló, mais vite !
- À vos ordres, Monsieur le rédacteur en
chef !…
- …
- À
votre service, Monsieur le rédacteur en chef.
- Qu’est-ce
que c’est ? On n’a pas une traître ligne pour le
numéro de Noël.
- J’ai
cru, Monsieur le rédacteur en chef...
- J’ai
cru, j’ai cru ! Allez à l’église avec vos
croyances – ici il faut savoir, mon petit, croire ne suffit pas ! Vous
vous mettez à votre bureau et vous me pondez une colonne et demie de nouvelles
théâtrales authentiques… Mais sans ciseaux !
- Maintenant ?…
Mais Monsieur le rédacteur… D’où…
- C’est
vos oignons ! Je vous avertis que je boucle à six heures précises !
Au boulot !
- À votre service, Monsieur le
rédacteur en chef.
Nouvelles
ThÉÂtrales
Moulin Rouge à Tokyo. La direction du Théâtre Hongrois est
actuellement envahie de lettres de gens intéressés qui, sur la trace de la
pièce dont le succès a fait sensation dans le monde entier, jalonnent partout
les sentiers de la gloire. Les agences théâtrales de Paris et de Londres ont
d’ores et déjà acquis les droits du chef-d’œuvre de Molnár, les directions des
théâtres de Stockholm et de Helsingfors se
sont fait personnellement représenter à la générale et de cette façon elles ont
pu directement négocier avec l’illustre auteur. À Tokyo les grandes pluies sont
suivies de tremblements de terre pour une raison que les météorologues n’ont
pas jusqu’à présent pu élucider ; mais ce n’est qu’une question de
jours pour que l’origine de ces tremblements soit définitivement mise en
relation avec le succès budapestois de Moulin Rouge. À Londres aussi on en parle
beaucoup.
Bernard Shaw et Puccini n’écrivent pas
d’opéra en commun. Contrairement
aux bruits qui courent selon lesquels Bernard Shaw et Puccini n’écrivent pas
d’opéra en commun, les correspondants des journaux parisiens et londoniens
pensent fermement savoir qu’il n’en a pas été question, et qu’il ne pouvait pas
en être question. D’après Comedia, ceux
qui voient une relation entre ces bruits et les visites de Shaw en Italie, ne
connaissent pas le style de cet auteur sardonique. La visite de Shaw chez
Puccini se déroule dans le plus strict incognito, personne n’est au courant,
mais on peut supposer que Shaw voulait simplement faire savoir au compositeur
qu’il ne fallait pas compter sur lui.
Fedák[1] dans « La
Tragédie de l’Homme ». On
murmure dans le milieu théâtral que Sándor Hevesi,
directeur du Théâtre National, souhaite monter La Tragédie de l’Homme de Imre Madách dans une toute nouvelle
distribution, de nouveaux décors et une mise en scène différente de toutes les
précédentes. Il veut principalement mettre l’accent principal sur la scène qui
fait la synthèse du temps présent – la scène qui se joue dans la Tower of
London, et dans laquelle en réalité nous participons tous comme des personnages
muets, également la grande Sári Fedák, qui dans Pompadour récolte en ce moment les plus
grands succès de sa brillante carrière.
La maladie de Gyula Hegedűs. Le grand acteur Gyula Hegedűs a attrapé il y a quelques jours une ouïe
bilatérale aux oreilles et une circulation sanguine centrale, mais selon l’avis
du médecin des théâtres il pourra de nouveau jouer Ivanov prévu pour la semaine
prochaine.
Artur Bárdos et
l’Union. Artur Bárdos,
directeur du Théâtre de la Renaissance, a donné son accord pour le choix de la
pièce suivante qui, comme on le chuchote dans les milieux du théâtre, sera
montée directement après qu’on aura retiré du programme la pièce que l’on a
jouée avant elle. Par contre la direction des théâtres de l’Union a décidé de
jouer systématiquement les pièces au programme avant la première de la pièce
suivante, ce qui nous paraît salutaire du point de vue de la continuité.
La valvule cardiaque d’Emilia Márkus[2]. Comme
on peut le lire dans la grande Anatomie Régionale de Szobota, dans l’avenir, tout comme dans le passé, elle
continuera de séparer l’aorte du ventricule droit, afin de régler le rythme
précis de la respiration.
Nouvelle étoile dramatique. Les astronomes de Greenwich ont découvert une nouvelle étoile qu’ils
prétendent être une des planètes de l’étoile fixe Alcyon qui a explosé
entre-temps par suite d’une collision tragique dans l’espace.
Színházi Élet, 1923, n°52.