Frigyes
Karinthy : Nouvelles parues dans la presse
notre villÉgiature
EEt mon épouse dit dans un flot de
larmes :
- C’est ce que j’ai mérité, moi, cette
vie-là ? C’est bien fait pour moi, j’aurais dû réfléchir. Les Mácsik sont déjà sur
Et Madame Fraccaroli
dit à son époux dans un flot de larmes :
- C’est ce que j’ai mérité, moi, cette
vie-là… C’est bien fait pour moi, j’aurais dû réfléchir !... Les Boudet sont depuis longtemps à Nice, les Courtevoisier à Hollywood, les Lebidois
à Viareggio – il n’y a que moi qui croupis ici à Engadin comme une fermière
clouée à sa terre dont le mari est invalide de misère. Le monde est plein de
beautés et de merveilles, de panorama et d’exotisme – et moi je flétris ici
dans ce bled pourri et perdu derrière le dos du Seigneur, au milieu de la
forêt… Je viens de lire une description de Budapest, la capitale hongroise…La
ville pleine de merveilles, regarde ici ces photos… Quelles vues sur le
Danube !... Et ces ponts !... Partout des bains et des piscines et
des sources naturelles d’eau chaude… Et une île splendide sur le Danube… Regarde
cette image… Et c’est là que passe l’été ce célèbre écrivain avec sa femme…Il
n’y a que moi qui pourris ici au milieu des paysans parce que mon époux n’a pas
daigné songer en hiver à m’emmener à Budapest en été.
Bács-megyei Napló, 23 juillet 1926.